Diagnostic et prise en charge de l'arthrose : des recommandations issues du NICE et du BMJ
Dernière mise à jour : 9 mars
Les recommandations énoncées ci-dessous sont issues du journal BMJ (Wood et al., 2023), et portent sur le diagnostic, l'évaluation et la prise en charge non chirurgicale de l'arthrose. Elles couvrent toutes les articulations, à l'exception de l'arthrose vertébrale. Elles visent à améliorer la prise en charge de l'arthrose et la qualité de vie des personnes atteintes d'arthrose. Les recommandations de cette ligne directrice représentent le point de vue du NICE (National Institute for Health and Care Excellence), obtenu après un examen attentif des preuves disponibles. Dans l'exercice de leur jugement, les professionnels et les praticiens sont censés tenir pleinement compte de ces recommandations, ainsi que des besoins individuels, des préférences et des valeurs de leurs patients ou des personnes utilisant leur service. Il n'est pas obligatoire d'appliquer les recommandations, et la ligne directrice ne l'emporte pas sur la responsabilité de prendre des décisions adaptées à la situation de l'individu, en consultation avec lui et sa famille et ses soignants ou son tuteur.
Que retenir pour un thérapeute manuelle ?
L'arthrose est un diagnostic clinique qui peut être posé sans imagerie chez les personnes de 45 ans ou plus, qui ont des douleurs articulaires liées à l'activité et qui n'ont : soit aucune raideur articulaire matinale, soit une raideur matinale qui ne dure pas plus de 30 minutes.
L'exercice thérapeutique est important pour les personnes souffrant d'arthrose afin de réduire la douleur et d'améliorer la fonction physique et la qualité de vie.
Les traitements analgésiques ne doivent être utilisés que pendant la durée la plus courte possible, principalement pour soutenir l'exercice thérapeutique.
Pour certains patients, une perte de poids peut être encouragée.
La thérapie manuelle est à considérer (en association avec des exercices) pour l’arthrose du genou et de la hanche.
Voici une traduction française de l'infographie proposée dans l'article original de Wood et al. (2023) :

Diagnostic
Il est possible de diagnostiquer cliniquement l'arthrose sans imagerie chez les personnes qui :
ont 45 ans ou plus ;
ET ont des douleurs articulaires liées à l'activité ;
ET ont une raideur matinale qui ne dure pas plus de 30 minutes ou aucune raideur articulaire matinale.
Pour poser le diagnostic il est recommandé de ne pas utiliser systématiquement l'imagerie pour diagnostiquer l'arthrose sauf s'il existe des caractéristiques atypiques ou des caractéristiques qui suggèrent un diagnostic alternatif ou supplémentaire.
Informations à donner au patient
Lorsque vous communiquez des informations aux personnes atteintes d'arthrose, à leurs familles et à leurs aidants, adaptez-les à leurs besoins individuels (tels que la langue et la culture), assurez-vous qu'elles soient dans un format accessible et suivez les recommandations sur :
La participation active des patients dans leur soin (Lien vers recommandation NICE sur l'expérience du patient).
La prise de décision partagée dans la directive (Lien vers recommandation NICE sur la prise de décision partagée).
L'approche des soins qui tient compte de la multimorbidité (Lien vers la directive du NICE sur la multimorbidité)
Expliquez aux personnes souffrant d'arthrose que :
Elle est diagnostiquée cliniquement et n'a généralement pas besoin d'imagerie pour confirmer le diagnostic ;
ET la prise en charge doit être guidée par les symptômes et la fonction physique ;
ET les principaux traitements de l’arthrose sont l'exercice thérapeutique et la gestion du poids (le cas échéant), ainsi que l'information et le soutien.
Indiquez aux personnes souffrant d'arthrose où elles peuvent trouver de plus amples informations sur :
L’arthrose et son évolution (y compris les poussées et sa progression dans le temps), et des informations qui remettent en question les fausses idées reçues courantes sur la maladie.
Des types d'exercices spécifiques.
Les différentes façons de gérer ses symptômes.
Comment accéder à des sources d'information et de soutien supplémentaires après les consultations, telles que des groupes de patients présentant de l’arthrose.
Les bénéfices et limites du traitement (présent au sein du consentement au soin).
Prise en charge non-pharmacologique
Les exercices à visée thérapeutique
Pour toutes les personnes souffrant d'arthrose, proposer des exercices thérapeutiques adaptés à leurs besoins (par exemple, renforcement musculaire local, conditionnement aérobique général).
Envisagez des séances d'exercices thérapeutiques supervisées pour les personnes souffrant d'arthrose.
Informez les personnes souffrant d'arthrose que les douleurs articulaires peuvent augmenter lorsqu'elles commencent un exercice thérapeutique. N’hésitez pas à expliquer que :
Faire de l'exercice régulièrement, même si cela peut initialement causer de la douleur ou de l'inconfort, sera bénéfique pour leurs articulations.
L'adhésion à long terme à un plan d'exercice augmente ses avantages en réduisant la douleur et en améliorant le fonctionnement et la qualité de vie.
Envisagez de combiner l'exercice thérapeutique avec un programme d'éducation ou des approches de changement de comportement dans un programme de traitement structuré.
La gestion du poids
Concerne les personnes souffrant d’arthrose qui vivent avec un surpoids ou une obésité :
Les informer que la perte de poids améliorera leur qualité de vie et leur fonction physique, et réduira la douleur.
Les aider à choisir un objectif de perte de poids.
Expliquer que toute perte de poids est susceptible d'être bénéfique, mais que perdre 10 % de son poids corporel est susceptible d'être meilleur que 5 %.
Pour obtenir des conseils et des informations sur la gestion du poids, y compris les interventions recommandées pour favoriser la perte de poids, consultez la page thématique du NICE sur l'obésité.
La thérapie manuelle
Il est recommandé de n'envisagez la thérapie manuelle (telle que la manipulation, la mobilisation ou les techniques des tissus mous) que :
pour les personnes souffrant d'arthrose de la hanche ou du genou ;
ET parallèlement à l'exercice thérapeutique.
Si vous envisagez la thérapie manuelle, expliquez lors de votre discussion sur la prise de décision partagée avec les personnes souffrant d'arthrose qu'il n'y a pas suffisamment de preuves pour soutenir son utilisation seule pour gérer les douleurs liées à l'arthrose.
Dispositifs d'aide
Envisagez de proposer à vos patients d'utiliser des aides à la marche (comme des cannes) pour les personnes souffrant d'arthrose des membres inférieurs.
Ne proposez pas systématiquement des semelles, orthèses, strapping, taping, attelles ou supports aux personnes souffrant d'arthrose, sauf si :
Il y a une instabilité articulaire ou une charge biomécanique anormale ;
ET l'exercice thérapeutique est inefficace ou inadapté sans l'ajout d'une aide ou d'un dispositif ;
ET l'ajout d'une aide ou d'un dispositif est susceptible d'améliorer le mouvement et la fonction.
Thérapeutiques non-recommandées
Les thérapeutiques non médicamenteuses ne montrant pas assez de preuve pour être recommandées dans la prise en charge de l’arthrose sont (« don’t offer ») :
Acupuncture
Dry Needling
Stimulation nerveuse électrique transcutanée (TENS)
Thérapie par ultrasons
Thérapie interférentielle
Thérapie au laser
Thérapie par ondes courtes pulsées
Stimulation électrique neuromusculaire (NMES).
Prise en charge pharmacologique
Médicaments topiques, oraux et transdermiques
Si des traitements pharmacologiques sont nécessaires pour gérer l'arthrose, proposez-les parallèlement aux traitements non médicamenteux et pour soutenir l'exercice thérapeutique à la dose efficace la plus faible pendant la durée la plus courte possible.
Proposez un anti-inflammatoire non stéroïdien (AINS) topique aux personnes souffrant d'arthrose du genou. Envisagez un AINS topique pour les personnes souffrant d'arthrose qui affecte d'autres articulations.
Si les médicaments topiques sont inefficaces ou inadaptés, envisager un AINS oral chez les personnes souffrant d'arthrose et tenir compte :
De la toxicité gastro-intestinale, rénale, hépatique et cardiovasculaire potentielle.
De tous les facteurs de risque que la personne peut avoir, y compris l'âge, la grossesse, les médicaments actuels et les comorbidités.
Proposez un traitement gastroprotecteur (tel qu'un inhibiteur de la pompe à protons) aux personnes souffrant d'arthrose pendant qu'elles prennent un AINS.
Ne proposez pas systématiquement du paracétamol ou des opioïdes faibles sauf si :
Ils ne sont utilisés que rarement pour le soulagement de la douleur à court terme ;
ET tous les autres traitements pharmacologiques sont contre-indiqués, non tolérés ou inefficaces.
Expliquer aux personnes souffrant d'arthrose qu'il n'y a aucune preuve solide d'un bénéfice pour le paracétamol. Pour plus d'informations sur les opioïdes, consultez les directives du NICE sur les médicaments associés à des symptômes de dépendance ou de sevrage.
N'offrez pas de glucosamine ou d'opioïdes puissants aux personnes pour gérer l'arthrose.
Si la personne souffrant d'arthrose pose des questions sur la glucosamine ou les opioïdes forts, expliquez-lui que :
Il n'y a aucune preuve solide d'un bénéfice pour la glucosamine.
Les risques des opioïdes forts l'emportent sur les avantages.
Examiner avec la personne s'il faut continuer le traitement. Basez la fréquence des examens sur le besoin clinique.
Injections intra-articulaires
Ne proposez pas d'injections intra-articulaires d'acide hyaluronique pour gérer l'arthrose.
Envisager des injections intra-articulaires de corticostéroïdes lorsque les autres traitements pharmacologiques sont inefficaces ou inadaptés, ou pour soutenir l'exercice thérapeutique. Expliquez à la personne que ceux-ci n'apportent qu'un soulagement à court terme (2 à 10 semaines).
Suivi et examen
Rendez-vous de suivi
Envisagez un suivi à l'initiative du patient pour la plupart des personnes souffrant d'arthrose.
Envisagez un suivi planifié pour les personnes souffrant d'arthrose lorsque leurs besoins et préférences individuels le suggèrent, en tenant compte de(s) :
Traitements ou interventions nécessitant une surveillance.
Leur capacité à chercher de l'aide pour eux-mêmes.
Leur profession et leurs activités.
La gravité de leurs symptômes ou limitations fonctionnelles.
Les personnes souffrant de plusieurs affections de longue durée sont susceptibles de bénéficier d'une approche adaptée conformément aux directives du NICE sur la multimorbidité.
Conseillez aux personnes souffrant d'arthrose de demander un suivi plus personnalisé si la prise en charge planifiée ne fonctionne pas dans un délai de suivi convenu ou si elles ont des difficultés avec les approches convenues.
Imagerie pour la gestion de l'arthrose
N’utilisez pas systématiquement l'imagerie pour le suivi ou pour guider la prise en charge non chirurgicale de l'arthrose.
Chirurgie
Envisagez de référer les personnes souffrant d'arthrose de la hanche, du genou ou de l'épaule pour une arthroplastie si :
Leurs symptômes articulaires (comme la douleur, la raideur, la fonction réduite ou la déformation articulaire progressive) ont un impact considérable sur leur qualité de vie ;
ET la prise en charge non chirurgicale (par exemple, exercices thérapeutiques, perte de poids, soulagement de la douleur) est inefficace ou inadaptée.
Utilisez l'évaluation clinique lorsque vous décidez de référer quelqu'un pour une arthroplastie, au lieu de moyen qui évaluent numériquement la gravité de la maladie.
Ne pas exclure les personnes souffrant d'arthrose de l'aiguillage vers une arthroplastie pour les raisons suivantes :
Âge
Sexe ou genre
Fumeur
Comorbidités
Surpoids ou obésité, sur la base de mesures telles que l'indice de masse corporelle (IMC).
Si vous discutez d'une recommandation pour une arthroplastie, expliquez à la personne souffrant d'arthrose que les risques d'une arthroplastie peuvent varier selon les facteurs énumérés ci-dessus.
Procédures arthroscopiques
Ne pas proposer de lavage ou de débridement arthroscopique aux personnes souffrant d'arthrose.
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Karl ALLEMANN, Gaëtan BARBIER et Laura PLICHON.
Pour la SoFEC.